Conflit RDC-Rwanda : au cœur des minerais de la discorde

Conflit RDC-Rwanda : au cœur des minerais de la discorde
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Alors que les affrontements se poursuivent dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), la question du contrôle des ressources minières s’impose comme un élément central des tensions persistantes avec le Rwanda.

Dans un communiqué officiel publié le 14 juillet 2025, le gouvernement congolais a réaffirmé que le soutien militaire de Kigali au mouvement rebelle AFC/M23 vise à s’assurer le contrôle des gisements stratégiques situés dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Cette accusation est catégoriquement rejetée par les autorités rwandaises, qui affirment n’avoir aucun lien avec les opérations du groupe rebelle.

Pourtant, plusieurs rapports indépendants – notamment ceux du Groupe d’experts des Nations unies sur la RDC – ainsi que des témoignages de terrain collectés par des ONG internationales comme Global Witness, Enough Project et Pax, confirment que l’exploitation et la contrebande des minerais jouent un rôle moteur dans la dynamique du conflit.

Les minerais en jeu : coltan, cassitérite, tungstène… et or

Trois ressources communément appelées « minerais 3T » dominent les enjeux économiques du conflit :

Le coltan, riche en tantale, indispensable dans les technologies électroniques.

La cassitérite, utilisée pour produire l’étain, essentiel aux composants électriques.

Le tungstène, stratégique pour l’industrie militaire et aéronautique.

En parallèle, l’or, bien que plus discret, constitue une source majeure de financement pour plusieurs groupes armés en raison de sa facilité de transport, de sa valeur élevée et de sa faible traçabilité. Selon les organisations présentes sur le terrain, l’exploitation artisanale de ces minerais est souvent contrôlée par des milices locales qui prélèvent des taxes illégales, imposent des redevances aux mineurs, ou encadrent directement les activités sur les sites.

Rubaya : une zone minière sous emprise rebelle

La localité de Rubaya, située dans le territoire de Masisi, est devenue un symbole de cette lutte pour le contrôle des ressources. Elle abrite l’un des plus importants gisements de coltan de la région. Selon les rapports des experts de l’ONU publiés en juin 2025, Rubaya représenterait entre 15 et 30 % de la production mondiale de coltan. Ces documents, appuyés par des témoignages d’observateurs de terrain et des acteurs humanitaires, confirment que l’AFC/M23 contrôle directement les opérations minières locales :

Encadrement des mineurs artisanaux

Surveillance des centres de tri et de lavage

Supervision des circuits de commercialisation

Les cargaisons extraites sont ensuite acheminées vers Goma, Bukavu ou Nyabibwe, avant de traverser la frontière vers le Rwanda. Une fois sur place, ces minerais sont intégrés aux chaînes d’approvisionnement officielles, souvent en étant mélangés à la production locale rwandaise, ce qui rend leur origine difficile à tracer.

Rwanda : hub minier régional ou relais de contrebande ?

Les autorités rwandaises défendent une autre lecture. Selon Kigali, le pays possède ses propres réserves de coltan, cassitérite et tungstène, exploitées dans un cadre réglementé. Le gouvernement met en avant un modèle de bonne gouvernance minière, avec des infrastructures modernes (fonderie d’étain, raffinerie de tantale, système de traçabilité) et une stratégie de transformation locale. Pourtant, les rapports d’ONG et des experts onusiens soulignent les incohérences entre les volumes exportés et les capacités minières connues du pays. Plusieurs cargaisons issues de la RDC seraient recommercialisées sous étiquette rwandaise, perturbant ainsi les chaînes de traçabilité imposées par les normes internationales comme la Dodd-Frank Act ou l’Initiative ITSCI.

Une guerre des ressources aux enjeux globaux

La crise entre la RDC et le Rwanda dépasse le seul cadre territorial : elle s’inscrit dans une compétition géopolitique pour l’accès aux ressources stratégiques.

Dans un monde en pleine transition énergétique et numérique, la demande en minerais critiques ne cesse de croître. Selon les experts de l’ONU et de l’OCDE, la pression internationale sur les gisements africains va s’accentuer, exacerbant les conflits locaux, les activités de prédation et les ingérences étrangères.

La rédaction


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